1. Présentation de l’atelier Photos
Bonjour à tous !
Chaque vendredi, l’atelier photos se déroule habituellement sur deux temps. Le matin est plutôt destiné à la pratique où nous découvrons un nouveau lieu en général situé à Strasbourg. Chaque participant au nombre de 4 dans l’idéal s’exercent à la photographie en y récoltant de nombreuses images. Les participants ont chacun un appareil photo Certaines séances sont accompagnées de consignes particulières et d’autres sont plus libres.
L’après-midi est consacré à l’observation et l’analyse des données recueillies. Je transfère toutes les photos des participants sur l’ordinateur puis nous les découvrons ensemble. Certaines photos font l’objet d’échanges intéressants entre nous.
L’activité photographique est un support d’apprentissage très riche où de nombreuses compétences peuvent se développer.
Les moyens ainsi déployés peuvent déboucher sur différents objectifs comme développer la créativité, promouvoir l’expression de soi, favoriser l’autonomie, améliorer les compétences techniques, accroitre la confiance en soi, encourager l’exploration et la découverte, promouvoir l’inclusion sociale et stimuler la mémoire.
2. Regards croisés
Il y a quelques temps déjà, nous avons décidé de visiter la cathédrale
Maeva qui avait l’occasion de nous accompagner ce jour-là me confie que c’est la première fois qu’elle visite ce merveilleux édifice.
Elle semble subjuguée par la beauté du lieu. Elle m’avoue également que c’est la première fois qu’elle utilise un appareil photo Après lui avoir expliqué les bases du fonctionnement de l’appareil, elle se met à capturer son environnement avec beaucoup d’attention. Après quelques temps, je regarde ses photos sur le petit écran LCD de son boitier et je réalise qu’elles sont toutes penchées. Je lui fais remarquer mais elle me fait comprendre que c’est l’effet souhaité.
Joseph est un photographe déjà expérimenté. Il m’accompagne régulièrement en sortie.
Depuis ses premiers pas en photographie, il observe la ville à travers l’écran de son boitier. Il ne lève presque jamais la tête pour observer le monde qui l’entoure. L’écran semble être le prolongement de ses yeux . La plupart de ses photos ont un point en commun : l’humain
J’ai beau lui dire de ne pas photographier les personnes sans leur demander leur accord au préalable, il ne semble pas comprendre l’importance de ce détail. Il se rapproche parfois très près des gens avec son appareil photo collé à son visage mais, étrangement, personne ne s’en est offusqué jusqu’à présent comme s’il avait un passe-droit.
Il est souvent loin derrière nous absorbé par de nombreuses images qu’il tente de capturer. Je dois toujours redoubler de vigilance pour ne pas le perdre de vue et l’inviter à nous rejoindre. C’est comme s’il était véritablement hypnotisé par certains détails qu’il essaye de capter avec précision et concentration.
Ces photos sont parfois très conceptuelles.
Vincent est un jeune homme qui a beaucoup de mal avec les changements.
À tel point d’ailleurs qu’il a énormément de difficulté à participer à un autre atelier que celui que j’anime tous les autres jours de la semaine, à savoir : la musique . Mes collègues arrivent quelques fois à le convaincre de participer à certaines activités mais il faut bien l’avouer, c’est très rare. J’ai l’impression qu’il fonctionne plus par affinité envers les personnes qu’envers les activités.
J’ai donc saisi l’occasion de cette relation privilégiée pour lui proposer de participer à l’atelier photos Et comme je l’avais pressenti, il accepta ma proposition sans hésiter.
Sa première sortie fût l’occasion de découvrir l’exposition « Perception » du photographe Denis Léonhardt au Sapin Vert à Bischheim. À ma grande surprise, il semblait très à l’aise. Cette visite nous a permis d’aborder la photographie sous l’angle de l’art et nous a aussi donné l’occasion d’essayer de répondre à cette grande question : A quoi sert la photographie ?
Vincent me suivait et m’écoutait attentivement. Dès que je prenais une photo, il imitait ma posture en prenant lui aussi les mêmes scènes. Il compris rapidement les bases du fonctionnement de l’appareil photo et se mit même à prendre des initiatives de lui-même en décidant de photographier tel ou tel sujet.
Ce jour-là, Vincent a pris beaucoup de photos. Il appuyait sur le déclencheur de façon répétée comme si le son du déclencheur l’amusait. Rien, ou presque, ne pouvait l’arrêter. En découvrant les photos l’après-midi, lors de la restitution, nous nous sommes rendus compte qu’il avait une vingtaine de photos identiques pour la même scène. L’air du numérique a clairement ses avantages !
Lors d’une autre sortie photos, nous avons visité le Palais universitaire de Strasbourg.
Manon a réussi à braver son vertige en montant quelques marches de l’escalier tout en prenant ma main. Très fière de sa prouesse, elle affiche un grand sourire
Chaque participant a déjà acquis un style bien à lui. Même ceux qui n’ont pas beaucoup d’expérience semblent très vite à l’aise avec leur boitier.
Contrairement à la plupart d’entre nous qui s’attachons à la norme sociale au point de réfréner notre spontanéité, eux sont dans un lâcher-prise qui favorise grandement leur créativité.
Manon qui débute la photographie depuis quelques mois seulement, réalise ses clichés aussi vite que l’éclair. À tel point d’ailleurs qu’elle a déjà un surnom : La Lucky Luke de la photo.
En parcourant les rues de la ville, je lui demande pourquoi elle fait autant de photos de véhicules ? Et elle me répond d’un air presque agacé tant la question lui semble évidente qu’elle est passionnée par les roues
Les sorties se suivent mais ne se ressemblent pas. Strasbourg est un merveilleux terrain de jeu où les sources d’inspiration sont inépuisables.
Au mois d’octobre dernier, nous avons visité l’église protestante Saint-Pierre-le-Jeune. C’est l’une des plus remarquable de Strasbourg du point de vue de l’histoire de l’art et de l’architecture.
Bryan était de la partie ce jour-là. C’est le seul participant qui ramène de la maison son appareil photo Il est toujours bienveillant vis-à-vis des autres et veille à ce qu’ils ne manquent de rien. Je le considère un peu comme mon assistant. Son aide est précieuse.
Voilà un échantillon de ce qu’il a récolté ce jour-là :
Toutes ces sorties sont l’occasion de mieux connaitre la ville et ses richesses culturelles et architecturales. Mais ces sorties et ces photos sont aussi un merveilleux moyens d’en apprendre d’avantage sur leur singulière personnalité et de se rendre compte que ces personnes m’apportent autant de choses que je leur en apporte.
3. L’art de la spontanéité
Depuis que l’atelier photo a été mis en place, de nombreux apprentis ont eu l’occasion d’y participer. Certains y ont participé de façon ponctuelle et d’autres de façon plus régulière.
Avec le temps, je me rend compte que la majorité des participants investissent l’activité avec spontanéité ce qui leur permet très rapidement de trouver un style personnel. Leur handicap n’est pas un frein à leur créativité, bien au contraire. Je pense même que c’est un atout.
Le mouvement surréaliste l’avait bien compris. André Breton définit ce mouvement artistique dans le premier Manifeste du surréalisme parut en 1924 comme un « automatisme psychique pur, par lequel on se propose d’exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée, en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale[…] ».
En résumé, les surréalistes veulent libérer la création artistique en refusant le contrôle de la raison afin de reconnecter l’humain avec son intériorité.
Et qui incarne le mieux cet automatisme de la pensée si ce n’est les personnes atteintes de déficience intellectuelle. Les limitations de certaines fonctions engendrent des compensations fonctionnelles qui dans certains cas deviennent des atouts.
Bien que la plupart d’entre eux ne connaissent pas ce mouvement artistique, ils en sont, à n’en pas douter, les dignes héritiers.
Merci et à bientôt !
Fabrice
Un très très grand merci pour ce partage empli d’émotion !!! Que la vie est belle au travers de ces échanges ….
Un grand merci Danielle pour ce retour d’impression !
Bravo aux photographes…
Je leur transmets ! Merci pour eux Alain !
Magnifique et passionnant ce reportage sur cet atelier photos ! Bravo aux artistes en herbe !
Et merci de nous faire découvrir votre travail avec autant de précisions et de détails…
Merci beaucoup Valentine d’avoir pris le temps de nous faire un retour de vos impressions ! Les artistes en herbe vous remercient chaleureusement !
J’ai adoré les photos ! C’est bien ! Merci pour tout !
Merci à toi Safaa ! Ta participation est précieuse et tes encouragements sont très stimulants !
J ai beaucoup aimé les photo penchées de Maeva très intéressant et bravo pour pour les nouveau photographes Belle initiatives Fabrice
Merci beaucoup d’avoir pris le temps de lire ce premier article ! Nous te remercions Odette avec une mention particulière de la part de Maeva !
Génial cet atelier!!!
Des superbes photos de nos artistes. Chaque photo résume en peu de mots ce que c’est que le regard. Etre porteur de handicap ou non, la lecture de soi, le regard que nous avons du monde et des choses est le reflet des lunettes avec lesquelles on les perçoit.
Je vois la signature unique des artistes ayant chacun, sa vision particulière du monde et des choses. Artistes en herbe ? En tous les cas, ils ont tout compris , Oscar Wild l’avait compris en disant je cite » La beauté est dans les yeux de celui qui regarde »
Bravo à nos artistes !!!
Merci beaucoup pour ton précieux commentaire Léonie. Je le transmets aux artistes !